
À travers les yeux de 576 délégué·es CFDT, l’enquête 2025 dresse un état des lieux du travail dans les Hauts-de-France : salaires, conditions, égalité, pouvoir de vivre.
Que pensent réellement les salarié·es de leurs conditions de travail, de leur rémunération, du dialogue social ou encore du sens qu’ils trouvent dans leur métier ? Pour y répondre, la CFDT Hauts-de-France a lancé une grande enquête régionale, dont les résultats ont été publiés en janvier 2025.
Menée avec le cabinet d’études Ferlab Marketing, cette consultation s’appuie sur les réponses de 576 délégué·es CFDT issu·es d’entreprises et d’administrations de tous secteurs, répartis sur l’ensemble du territoire régional.
L’objectif : dresser un état des lieux précis du climat social, des attentes exprimées sur le terrain, et des priorités à porter dans les mois à venir.
Conditions de travail, reconnaissance, rémunération, égalité professionnelle, transition écologique ou encore « pouvoir de vivre »… les thématiques abordées reflètent les préoccupations concrètes des salarié·es. Les résultats offrent aux militant·es un outil précieux pour mieux comprendre la réalité vécue sur le terrain et nourrir le dialogue avec les employeurs, les pouvoirs publics et les acteurs économiques.
Ce document présente une synthèse fidèle et structurée des principaux enseignements de cette enquête, pour éclairer les enjeux du travail aujourd’hui et demain.
Perception générale
La première partie de l’enquête CFDT Hauts-de-France 2025 s’intéresse à la perception globale du travail par les délégué·es interrogé·es. Elle met en lumière un attachement fort des salarié·es à leur entreprise ou administration, mais aussi un ressenti largement négatif sur l’évolution récente des conditions de travail. À cela s’ajoute une montée des inquiétudes face aux changements à venir, souvent associés à des risques pour la qualité de vie au travail.
Un lien encore fort au collectif de travail
Lorsqu’on leur demande d’évaluer leur degré d’attachement à leur entreprise ou administration sur une échelle de 0 à 10, les répondant·es attribuent une note moyenne de 7, bien supérieure à la moyenne nationale mesurée par le baromètre Ipsos/Cevipof (5,9).
Ce résultat montre que, malgré les tensions et les difficultés parfois exprimées, le lien avec l’environnement professionnel demeure solide pour une majorité de salarié·es.
Une situation jugée en nette dégradation
Mais cet attachement coexiste avec une perception fortement dégradée de l’évolution des conditions de travail. À la question : « Au cours des 12 derniers mois, comment évaluez-vous la situation de votre entreprise ou administration ? », les chiffres sont révélateurs :
- 34 % des répondant·es estiment qu’elle s’est un peu dégradée,
- 35 % jugent qu’elle s’est beaucoup dégradée,
Soit un total de 69 % exprimant un ressenti négatif.
En comparaison, seuls 11 % considèrent que la situation s’est améliorée, tandis que 35 % la jugent stable. Ces résultats traduisent une forme de désillusion face aux transformations récentes, perçues comme déstabilisantes, mal accompagnées ou non concertées.
Des inquiétudes marquées face à l’avenir
Cette tension se prolonge lorsqu’on interroge les salarié·es sur leurs principales craintes liées aux changements à venir dans leur environnement professionnel. Parmi les réponses proposées, plusieurs préoccupations dominent :
- 31 % redoutent un durcissement des objectifs,
- 28 % craignent un risque de licenciement,
- 22 % ont peur d’être empêchés de bien faire leur travail,
- 20 % évoquent le risque d’être marginalisés ou « placardisés ».
À ces inquiétudes s’ajoutent celles liées à l’introduction de nouvelles technologies (10 %), à la mutation forcée (10 %), ou encore à l’arrivée d’un nouveau manager (9 %).
Seuls 11 % des répondant·es déclarent n’avoir aucune crainte spécifique.
Ces résultats dessinent un climat d’incertitude et de vigilance. Les salarié·es expriment une peur que les changements se traduisent par plus de contraintes, moins de reconnaissance, et une perte de contrôle sur leur activité.
Conditions de travail
L’analyse des réponses sur les conditions de travail révèle un malaise. Si une partie des salarié·es s’en dit satisfaite, les indicateurs globaux montrent une réalité bien plus nuancée, marquée par des déséquilibres persistants et un déficit de reconnaissance.
Une satisfaction relative… et fragile
À la question « Diriez-vous que les conditions de travail dans votre structure sont satisfaisantes ? », seuls 55 % des répondant·es expriment un avis favorable.
Les 44 % restants considèrent ces conditions comme plutôt pas satisfaisantes (31 %) ou pas du tout satisfaisantes (13 %).
L’indice moyen global s’établit à 5,0 sur 10, un score modéré, qui cache de fortes disparités selon les thématiques abordées.
Des points de rupture sur l’organisation du travail
Lorsque l’enquête entre dans le détail des composantes du quotidien professionnel, les écarts se creusent. Plusieurs éléments sont évalués selon un indice sur 10, basé sur le niveau de satisfaction :
- Prévention des risques d’accidents du travail : 5,5
- Quantité de formations proposées : 4,6
- Répartition des tâches : 4,3
- Sens donné au travail : 4,2
- Charge de travail vs temps disponible : 4,0
- Égalité de traitement entre les travailleur·ses : 3,9
- Égalité des salaires : 3,9
- Charge de travail vs effectif : 3,6
- Qualité du management : 3,4
- Reconnaissance des salarié·es : 2,9
Ces résultats traduisent un déséquilibre structurel dans l’organisation du travail : surcharge, effectifs insuffisants, management mal perçu et sentiment d’injustice dans la reconnaissance des efforts fournis.
Le sens du travail, un repère central pour les salarié·es
Malgré les critiques formulées sur les conditions de travail, le besoin de sens reste très fortement exprimé par les répondant·es. Les résultats associés aux questions sur “un travail qui a du sens” en témoignent clairement. Les salarié·es attribuent des notes élevées aux dimensions liées à l’utilité sociale de leur activité.
Ces résultats montrent que, au-delà de la reconnaissance et de l’organisation, les salarié·es attendent de leur travail qu’il ait un sens, qu’il contribue positivement à leur environnement et qu’il respecte leurs convictions. Ce besoin de cohérence entre action professionnelle et valeurs personnelles est un signal fort adressé aux employeurs et à l’ensemble des acteurs du monde du travail.
Rémunération et pouvoir de vivre
La rémunération reste un marqueur central du lien au travail. Elle incarne non seulement la reconnaissance des efforts fournis, mais aussi la possibilité de vivre dignement. Sur ce sujet, les résultats de l’enquête CFDT témoignent d’un mécontentement majoritaire et d’un décalage profond entre attentes et réalité.
Une rémunération jugée insuffisante
À la question : « Diriez-vous que les niveaux de rémunération (fixe, variable…) sont satisfaisants dans votre entreprise ou administration ? », seuls 37 % des répondant·es se déclarent satisfaits.
En face, 63 % expriment une insatisfaction.
L’indice moyen s’établit à 3,9 / 10, bien en deçà du seuil de satisfaction.
Ce ressenti se retrouve dans l’évaluation des dernières négociations salariales collectives :
- 32 % considèrent les accords obtenus comme satisfaisants,
- 68 % les jugent insatisfaisants,
avec un indice moyen de 3,5 / 10.
Ces chiffres traduisent un sentiment de stagnation salariale, souvent perçue comme injustifiée au regard de l’engagement au travail et du contexte inflationniste.
Des écarts de rémunération mal vécus
Interrogé·es sur les inégalités salariales, 86 % des répondant·es estiment que les écarts entre les plus hautes rémunérations et les plus bas salaires sont importants.
À peine 13 % considèrent ces écarts comme modérés ou faibles.
Ce ressenti contribue à une perception d’injustice, notamment lorsque les augmentations bénéficient majoritairement à des fonctions dirigeantes ou managériales, au détriment des premières lignes.
Évolutions de carrière
Au-delà du salaire, la possibilité d’évoluer professionnellement au sein de son entreprise ou administration reste un marqueur important de reconnaissance et de projection. Pourtant, sur ce sujet, les résultats de l’enquête sont particulièrement critiques.
Des progressions jugées arbitraires
Lorsqu’on interroge les délégué·es sur la façon dont les évolutions de carrière sont gérées dans leur structure, la perception dominante est celle de l’arbitraire.
La caractéristique la plus fréquemment citée est que ces évolutions sont « à la libre appréciation du dirigeant ». Cette affirmation obtient un indice de 6,8 sur 10, ce qui en fait la seule dimension « positive » du point de vue de la fréquence… mais négative sur le fond : elle traduit une absence de cadre clair ou d’équité perçue.
Les autres indicateurs sont bien plus faibles :
- Évolutions concertées : 2,8 / 10
- Évolutions organisées par accord : 2,9 / 10
- Évolutions fréquentes : 3,0 / 10
- Évolutions justes : 2,7 / 10
Ces scores illustrent une triple insatisfaction : les salarié·es estiment que les progressions sont rares, non encadrées collectivement, et injustes. Cette impression de dépendre d’un bon vouloir hiérarchique renforce un sentiment d’inégalité et alimente une forme de découragement face à l’idée d’investir dans son avenir professionnel.
Ces données renforcent les constats déjà exprimés sur le manque de reconnaissance ou de transparence dans la gestion des ressources humaines.
Dialogue social
Le dialogue social est un levier essentiel pour améliorer les conditions de travail, anticiper les changements, et construire un climat de confiance. Pourtant, les résultats de l’enquête CFDT révèlent une perception souvent critique de la qualité des échanges avec les directions.
Une satisfaction minoritaire, un indice en demi-teinte
À la question : « Comment évaluez-vous le dialogue social dans votre entreprise ou administration ? », 46 % des répondant·es se déclarent satisfaits.
À l’inverse, 54 % sont insatisfaits, dont :
L’indice moyen global de satisfaction s’établit à 4,4 / 10, un score modéré, qui souligne une forme de frustration face au fonctionnement du dialogue social dans les structures.
Une incompréhension persistante des préoccupations des salarié·es
Plus inquiétant encore, seuls 13 % des répondant·es considèrent que leur direction comprend et répond aux préoccupations des travailleur·ses.
La majorité — 63 % — estiment que leur direction comprend partiellement, mais ne répond pas ou peu à ces attentes. Enfin, 23 % jugent que leur direction ne comprend pas du tout les préoccupations exprimées.
Ces résultats traduisent une distance perçue entre les discours de la direction et la réalité vécue par les équipes. Ils révèlent aussi un déficit de reconnaissance du rôle des représentants du personnel dans l’identification des problèmes et la construction de solutions.
Des priorités claires, partagées par le terrain
L’enquête interroge aussi les délégué·es sur les sujets qu’ils jugent prioritaires dans le cadre du dialogue social. Trois grands thèmes se détachent :
- Les salaires et le pouvoir d’achat : cités par 70 % des répondant·es,
- Les conditions et l’organisation du travail : 59 %,
- La participation des salarié·es aux décisions : 26 %.
Ces priorités confirment que, pour être efficace, le dialogue social doit porter sur des sujets concrets, quotidiens, et directement liés à la qualité de vie au travail. Et pour produire des effets durables, il doit s’appuyer sur une reconnaissance mutuelle entre salarié·es, représentant·es du personnel et directions.
Égalité professionnelle et violences
La promesse d’un environnement de travail égalitaire et respectueux reste une attente forte des salarié·es. Pourtant, les résultats de l’enquête montrent que les inégalités et les violences au travail demeurent des réalités largement présentes dans les entreprises et les administrations interrogées.
Une égalité encore loin d’être acquise
Interrogé·es sur le respect de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, seuls 64 % des répondant·es jugent cette égalité respectée :
À l’inverse, 35 % considèrent que l’égalité n’est pas ou peu respectée.
Ces chiffres traduisent une perception persistante d’inégalités, qu’il s’agisse d’accès aux responsabilités, d’écarts de rémunération, ou de reconnaissance au travail.
Des violences encore trop présentes
L’enquête interroge également les délégué·es sur les violences et les injustices observées dans leur structure au cours des 12 derniers mois. Les résultats sont saisissants :
- 47 % déclarent avoir eu connaissance de harcèlement moral,
- 34 % de violences verbales,
- 14 % de harcèlement sexuel,
- 6 % de violences physiques.
Ces données ne reflètent pas nécessairement des signalements officiels, mais elles montrent que ces situations sont visibles, identifiables, et parfois banalisées dans les environnements de travail.
Plus préoccupant encore, près d’un·e répondant·e sur deux (47 %) estime que ces violences et injustices sont en hausse, contre 43 % qui les jugent stables, et seulement 9 % qui constatent une amélioration.
Ces constats rappellent qu’au-delà des dispositifs juridiques ou des politiques d’entreprise affichées, la prévention des violences et la lutte contre les discriminations nécessitent un engagement permanent.
Transition écologique
Alors que la transition écologique s’impose dans les débats publics, l’enquête CFDT révèle que le monde du travail peine encore à s’en emparer concrètement. Si certaines structures amorcent des démarches, la majorité reste en retrait, et les salarié·es y sont peu associés.
Une présence encore limitée du sujet
À la question : « Le sujet de la transition écologique est-il présent dans votre entreprise ou administration ? », seuls 15 % des répondant·es répondent « oui, tout à fait », et 49 % « oui, plutôt ».
Mais 36 % déclarent que ce sujet est plutôt pas (24 %) ou pas du tout présent (12 %).
Cela signifie que dans plus d’un tiers des structures, la transition écologique reste absente ou très peu abordée au sein des collectifs de travail.
Des stratégies d’entreprise encore floues
Interrogé·es sur l’existence d’une stratégie d’entreprise ou d’administration pour réussir la transition écologique :
- 15 % répondent « oui, tout à fait »,
- 51 % « oui, plutôt »,
- mais 25 % « plutôt pas » et 10 % « pas du tout ».
Si une majorité relative perçoit des efforts, 35 % des structures semblent n’avoir encore rien engagé de structuré sur ce sujet.
Des salarié·es peu associés à la démarche
Enfin, l’enquête révèle un point de fragilité important : la faible implication des salarié·es dans les démarches environnementales.
À la question « Avez-vous été associé·e à la stratégie de transition écologique de votre entreprise ou administration ? » :
- 9 % seulement répondent « oui, tout à fait »,
- 33 % « oui, plutôt »,
- contre 41 % « plutôt pas » et 17 % « pas du tout ».
En somme, plus de la moitié des répondant·es n’ont pas été associés à la réflexion écologique de leur structure, alors même que cette question touche à l’organisation du travail, aux processus, aux investissements et aux métiers.
Ces données montrent que la transition écologique est encore trop souvent pensée sans les salarié·es, alors qu’ils et elles sont pourtant des acteurs clés de sa mise en œuvre au quotidien.
Pouvoir de vivre
L’enquête CFDT pose une question simple mais centrale : la rémunération permet-elle aux salarié·es de vivre décemment ? Les réponses traduisent une réalité sociale préoccupante, où le travail, bien qu’indispensable, ne protège plus systématiquement contre les difficultés du quotidien.
Une majorité estime ne pas vivre décemment de son salaire
À la question « Estimez-vous que votre rémunération actuelle vous permet de vivre décemment ? », 57 % des répondant·es répondent non :
À peine 43 % répondent positivement, dont :
Ces chiffres confirment que, pour une large part des salarié·es, le niveau de rémunération ne couvre pas l’ensemble des besoins essentiels, malgré un emploi à temps plein ou un engagement professionnel réel.
Des renoncements de plus en plus fréquents
Lorsqu’on interroge les délégué·es sur les conséquences concrètes de cette situation, 63 % déclarent avoir dû réduire ou renoncer à certains achats du quotidien au cours des 12 derniers mois.
Les postes de dépenses les plus souvent concernés sont :
- Loisirs : 65 %
- Vacances : 60 %
- Équipements du foyer : 39 %
- Alimentation : 38 %
- Énergie (électricité, gaz) : 32 %
- Santé : 13 %
- Logement : 5 %
- Hygiène : 1 %
Ces chiffres rappellent que le « pouvoir de vivre » ne se limite pas à des considérations budgétaires : il touche à la dignité, à la projection dans l’avenir, à l’accès à une vie sociale et culturelle, et au droit à un quotidien équilibré.
Et chez nous, à la Brioche Dorée ?
Cette enquête, bien qu’elle couvre l’ensemble des secteurs professionnels de la région Hauts-de-France, dresse un portrait qui peut résonner avec les réalités vécues dans bien des environnements de travail, notamment dans le secteur de la restauration rapide.
Sans tirer de conclusions hâtives ni extrapoler au cas de Brioche Dorée (Groupe le Duff), ces résultats invitent à se poser une question simple mais essentielle :
Comment les salarié·es de la Brioche Dorée perçoivent-ils aujourd’hui leur travail ?
Conditions de travail, perspectives d’évolution, reconnaissance, pouvoir d’achat, équilibre de vie, dialogue social… autant de sujets qui méritent d’être explorés collectivement, dans un climat d’écoute et de respect.
Dans une enseigne comme la Brioche Dorée, dont une partie du réseau fonctionne en franchise, ces questions prennent un relief particulier, tant pour les salarié·es d’établissements franchisés que pour ceux des structures intégrées.
Mieux comprendre le ressenti des équipes, c’est aussi mieux accompagner les transformations en cours et construire un cadre de travail plus juste et durable, dans toutes les dimensions de l’entreprise.
Avec plus de 570 répondant·es, cette enquête régionale menée par la CFDT Hauts-de-France offre un état des lieux précis du travail : ses forces, ses failles, ses tensions.
Elle révèle un attachement toujours fort au travail, mais aussi une dégradation ressentie des conditions d’exercice, une insatisfaction notable sur la rémunération, des dialogues sociaux parfois fragiles, et des enjeux transversaux encore insuffisamment pris en compte, comme l’égalité professionnelle ou la transition écologique.
Ce travail de terrain fournit une base solide pour alimenter les échanges, porter des propositions, et défendre un modèle de travail plus juste et plus durable.
Retrouvez l’intégralité des résultats de l’enquête CFDT Hauts-de-France en version PDF :
Télécharger l’enquête 2025 – CFDT Hauts-de-France (PDF)
Source : CFDT Hauts-de-France – Enquête réalisée en partenariat avec Ferlab Marketing
CFDT UES Brioche Dorée